samedi 27 février 2016

Jacques à dit !




Désolée pour cette absence. Je manquais trop au milieu hospitalier...il m 'a rappelé !
Finalement, l'idée d'un blog n'était peut-être pas si bonne, depuis que je l'ai commencé je suis plus souvent à l'hôpital que chez moi. (les mauvaises langues diront que ce n'est pas vrai, que j'ai toujours fréquenté ce lieu assidument...mais ne les écoutez pas !)
Aujourd'hui un article sérieux, qui marque mon ras le bol. Je préviens ceux qui s'attendent à une bonne tranche de rire...vous pouvez partir maintenant. Il s'agit plutôt d'une réflexion personnelle, qui j'espère amènera la vôtre.
Le sujet ? La place du libre-arbitre chez le patient. (Vous avez 2 heures ! Que voulez-vous la philo est une passion).

Jusqu'où sommes nous libre de choisir les soins, les actes que nous recevons ? Sous prétexte que cela sert à nous soigner, devons nous tout accepter ? Quelle place avons-nous face aux médecins ? Ils ont le savoir universitaire mais en tant que patient nous avons le vécu. Y en a-t-il un qui pèse plus lourd que l'autre? Sont-ils complémentaires ?
J'ai souvent eu cette impression que mon corps ne m'appartenait plus vraiment. Quand à 11-12 ans, en plein début de mon adolescence, je me retrouvais plus souvent en sous-vêtements devant les médecins que devant mon miroir, j'ai été obligé de mettre une certaine distance avec ce corps qui m'était encore étranger. Baisses-toi ! Touches tes pieds ! Tends ton bras ! Ta colonne n'est pas droite ! Allonges-toi ! Relèves-toi ! ( mais t'as même pas dit "Jacques à dit" !)
Ce corps qui m'appartenait, les médecins avaient l'air de le connaître mieux que moi !
A partir de là, comment faire pour en garder la maîtrise ?

A 15 ans, lors d'un examen d'imagerie de routine sur une épaule luxée, le médecin chargé de la réalisation de l'examen voulait absolument que le bras luxé soit derrière mon dos. (Pas évident de visualiser mais je vous assure que ce n'est pas la position la plus agréable ni la plus facile à tenir). Au bout de 15 minutes, c'était devenu intenable, j'ai pleuré. Il m' a alors sermonné, me menaçant d'appeler ma mère qui selon lui se mettrait de son côté. Nous avons stoppé l'examen et il a mis sa menace à exécution. Mais il était loin de penser que Madame Clochette prendrait ma défense.
Qui était-il pour décider du seuil de douleur que je pouvais tolérer ?

Vendredi, ma deuxième bouche a cédé de nouveau. Le médecin devait donc en poser une autre. La pose d'une voie veineuse centrale se fait en anesthésie locale, mais ce n'est pas le geste le plus agréable qui soit. (ça ne vaut pas le plaisir procuré par une crêpe banane Nutella amandes effilées quoi !)
Mon cerveau n'avait sans doute pas encore effacé les restes douloureux infligés par le premier essai, 15 jours auparavant. Et il avait raison de se méfier...L'opération restera un de mes plus mauvais souvenir. (Avec la fois où je n'avais plus de Nutella pour confectionner ma fameuse crêpe banane/nut...oh ça va !    Si on ne peut plus plaisanter...) L'anesthésie locale n'ayant pas fonctionnée comme elle devait, c'est tout mon corps qui a été sanctionné, traversé par des décharges électriques que même une Raie n'égaleraient pas ! (oui, la Raie envoie des décharges ...on dit merci à Arte pour ce moment culture du monde animal). Bref, après 2h30 de lutte, le médecin a décidé d'en finir. (Mais non il n'a pas attenté à ses jours ! Il a juste jeté ses gants de désespoir en pestant qu'on n'y arriverait pas mais que ce n'était pas à moi qu'il en voulait mais à l' anesthésiant...bien aimable de ne pas me remettre la faute dessus !)
Je savais qu'il faudrait recommencer l'acte mais Monsieur le docteur avait évoqué une anesthésie générale...Soulagement !
Soulagement ? Pas tant que ça car finalement l'idée d'une sédation totale a vite été remise en question.
Encore une fois, on jugeait pour moi ce que j'étais capable de supporter ! L'idée même de revivre la douleur de cette pose était inconcevable.
Je suis une patiente "modèle", la bonne élève...Pas rebelle pour un sou, qui absorbe tout, qui ne contredit pas...Je respecte le savoir universitaire et la blouse blanche. Je ne remets pas en question ! J'applique ce qu'on me demande, j'essaye leurs drogues, je teste les effets secondaires, je suis docile...Mais pas cette fois ! Une petite voix m'a soufflé de ne plus faire confiance, d'arrêter de tout accepter ! Mon libre-arbitre s'est réveillé me criant : "Briochette ! STOP ! C'est ton corps ! TU décides de ce qui est bien pour toi, le seuil de douleur que tu ne peux pas dépasser, la manière dont tu es traitée. Trop bon, trop con !" (Bon en vrai j'entends pas de voix...enfin, je crois !)
Du coup, j'ai fait face. Pour la première fois de ma vie je me suis opposée au corps médical. J'ai refusé toute nouvelle intervention qui n'aurait pas lieu sous anesthésie générale. Ça a du faire mal à leurs égos...mais je m'en moque !

J'ai décidé que désormais si mon libre-arbitre me souffle que la personne n'a pas dit "Jacques à dit", je ne m'exécuterai plus ! La vie est un jeu ? Dans tous les jeux,  y a des règles. Désormais, plus personne ne bouge mon pion à ma place !

Jacques à dit : Article terminé ! Mangez une crêpe ou baignez vous avec les raies !

lundi 15 février 2016

Intouchables !

Avec un titre pareil on s'attend à la crème de la crème ? Ben ... ne rêvez pas trop chers lecteurs...
Rien de poétique, rien de philosophique, juste une histoire anecdotique ! (Ce n'est pas pathétique toutes ces rimes en -ique, c'est presque héroïque ! Oh ça va ! Laissez moi savourer ce petit plaisir !)

Qui n'a pas vu Intouchables ? (Mais siiiii ce film avec l'handicapé là !!! (Vous l'avez remarqué ce vilain L apostrophe ?) Si, si roooh mais c'est celui du SAV des émissions qui joue dedans, le noir làààà ... et hum l'autre qui joue l'handicapé (comique de répétition, je n'ai plus de secret !) c'est le mari de celle qui joue dans fais pas ci fais pas ça, enfin l'ex car ils ne sont plus ensemble je crois ... Bon ben en tous cas, tu ne l'as pas vu toi ? Non ? Mais comme t'es en charrette (oui oui je vous l'assure, certaines personnes utilisent encore ce terme pour désigner le fauteuil roulant...on a "chariote" aussi comme variante et "chariot"...et ça n'a rien à voir avec la choucroute mais hier je regardais un reportage dans lequel un gars blessé pendant les attentats parlait de fauteuil automatique ... enfin, bref !)
Ben faut que tu le vois hein ! Il est fait pour VOUS ! (Vous, sous-entendu, les gens comme toi ... La communauté des handicapés quoi !) 

Non, non, non et non. Vraiment, ce n'est pas parce qu'on est concerné par un sujet qu'on saute sur tout ce qui le concerne. Ça n'a pas de sens ! On retrouve la même chose, pour le film : La famille bélier. Si tu es sourd ou malentendant tu es OBLIGE de l'avoir vu, hé en plus c'est sous-titré alors ne déconnes pas ; c'est fait pour toi ! Et du coup si un jour on sort le biopic de Ray Charles ou Gilbert Montagné au cinoche... on fait comment ? (Je vous laisse méditer calmement sur cette proposition ...)

Ha ha j'imagine déjà la conversation entre Michel aveugle depuis 3 ans et son ami : (Les personnages et les situations de ce récit étant purement fictifs, toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite. » 

"- Hé Michel, tu l'as vu le biop...oh merde, désolé Michel, euh je voulais pas dire voir, enfin si ...mais comme toi, tu ... enfin, tu ne m'en veux pas trop ? Je euh...bon je file faut que j'aille chercher les gosses à l'école ! Hein ? Ah non, non t'as raison j'en n'ai pas, mais c'est ceux du fils de ma nièce...Allez, salut Michel, on se revoit bientôt ! Ah euh ben non du coup..."

On se perd là !!! Re-concentrons-nous. 

Donc non, je n'ai pas couru voir ce film. ( oui détendez-vous avec le vocabulaire utilisé, on peut dire "on va marcher" à une personne en fauteuil, "tu as vu" à une personne aveugle et "écoutes un peu quand on te parle" à une personne sourde ...et petit clin d’œil à mon entourage, ça ne me met pas mal à l'aise quand vous me dites "bon appétit" !)
J'ai fini par le visionner (mais je ne crois pas être aller au cinéma, du moins si c'est le cas ça ne m'a pas marqué). Il faut savoir, pour l'ironie de la chose, que dans mon repère de Clochette, les cinémas ne sont pas tous accessibles. Alors là c'était l'incompréhension générale : Quoi ? Ils sont en fauteuils, et ils ne peuvent même pas aller voir un film qui parle d'eux ? 
Alors déjà, ils ne parlaient pas de NOUS, mais d'une personne très précise. C'est comme si on vous demandait si vous étiez allez voir Belle et Sébastien, parce que "quand même tu as aussi un Berger des Pyrénées" ? Du coup, devant les aristochats, on emmène que nos amis à quatre pattes ?  (Je me demandais juste où s'arrêtait le cloisonnement...)
 Ensuite, moi ce qui me révolte (et ce qui devrait tous nous révolter) ce n'est pas que CE film ne soit pas accessible, mais que le cinéma EN GENERAL ne soit pas accessible ! 

Bref, pour ceux qui ne l'ont pas vu, c'est un film Français sympa. (ça ne casse pas non plus trois pattes à un canard). Un bon moment passé, quelques scènes drôles... 
Mais ce film m'a énervé. Non pas pour ce qu'il est mais pour toutes les réactions qu'il a provoqué. Impossible de mettre une roue dehors, (oh oh oh, humour quand tu nous tiens ) sans entendre : "Attendez je vais vous aider, j'ai vu Intouchables ! Je sais ce que ça fait !  ou "Ah, c'est comme dans Intouchables !" 
Non, tu ne sais pas ! C'est un film, un vulgaire film ! Tu ne te rends pas compte de ce que c'est et tu n'es pas sensibilisé juste parce que tu l'as vu. C'est quoi cet engouement soudain ? 

Mais je vous ai réservé le meilleur pour la fin... 

Un jour, j'étais dans le métro (il s'en passe des choses dans le métro de la ville de Clochette hein), j'allais prendre l’ascenseur (qui fonctionnait ô joie). Un homme d'une trentaine d'années monte dans l'élévateur avec moi (oui ça va de pair avec chariot ce mot, le sans-efforceur c'est réservé aux fans d'Astérix). 

Il me lance : 
"Hé Mademoiselle, c'est comme dans Intouchables !" 
*Sourire poli et insultes intérieures* "Haha, oui !"
"Et du coup, z'êtes comme le gars là, vous sentez pas l'eau chaude sur les jambes ? (Parce que je vous aime bien, et que vous n'êtes pas forcément en fauteuil et donc que vous n'avez pas forcément vu le film, je vais vous expliquer ce passage. Les "marchants" aussi avaient le droit de le voir ? Je ne savais pas ...
L'histoire est la suivante : A la suite d’un accident de parapente, Philippe (joué par Cluzet l'ex de Valérie Bonneton) , riche aristocrate, engage comme aide à domicile Driss (joué par Omar Sy), un jeune de banlieue sorti de prison. (Merci Allo Ciné) 
Une scène culte du film, c'est lorsque Driss s’aperçoit que Philippe, n'a plus de sensation aux jambes et lui verse de l'eau bouillante dessus pour confirmer qu'il ne sent rien.

Je n'ai pas pu résister ... 

"Nop, je sens rien de rien !"
"Ah mais c'est chauuuud ! Du coup, vous pouvez pas faire l'amour non plus !" (Oh pas de panique, tout le monde sait que l'handicapé n'a pas de vie privée, qu'il peut parler de tout très librement et n'a pas d'estime de soi...)
 Mon gars, tu ne m'en voudras pas mais je me suis servie de toi pour me divertir ...
"Ah ben non, hein, je peux plus du tout ... Je ne sens plus rien à partir du cou ..."
"Ah ouai mais c'est chauuuuud ! T'as eu quoi ?" (Ah ben, la sexualité ça rapproche, on a passé une minute ensemble dans l'ascenseur, on était potes pour la vie quoi ! Allez, on peut bien se tutoyer !)
"Accident de parachute, j'ai sauté... ça ne s'est pas ouvert ...et paf !" 

 Je n'ai pas pu filmer l'expression du moment mais c'était ...jouissif. C'était la première fois que je mentais sur ce que j'avais. C'était gros comme une maison ! Je lui ai dit que j'étais paralysée à partir du cou en lui montrant avec mes bras... pas futé futé le garçon. 
Je me suis défoulée sur lui. J'avoue... mais il faut aussi arrêter de croire que nous n'avons pas d'intimité. 

Je n'ai jamais refusé d'expliquer à quelqu'un ce que j'avais. Ceux qui me connaissent le savent, je suis ouverte là dessus. Pour moi, il est normal d'expliquer pour ne pas créer d'incompréhension. Mais il y a des limites. Je prends le temps d'en parler aux personnes que je vais fréquenter (même le temps d'un diner par exemple) mais toi l'inconnu croisé à la caisse du supermarché ou dans le métro, tu n'as pas à connaitre ma vie.
J'ai eu une écharpe au bras pendant 5 ans. Les gens croisés dans la rue, ayant également une attelle, me parlait comme si nous nous connaissions depuis toujours. 
"Je me suis cassée la clavicule au ski, j'en ai pour au moins 6 semaines... c'est long hein ! J'en peux déjà plus ...et vous ?"
"Moi ça fait 3 ans que je l'ai ...mais vous avez raison, c'est long 6 semaines..."

Oui, ça jetait un froid, je le concède... Mais je m'interroge encore profondément sur les raisons qui nous poussent à nous rapprocher de "nos semblables". Comme si nous avions cette capacité de créer de minis communautés. Les femmes enceintes se parlent-elles lorsqu'elles se croisent dans le bus ? 
Les personnes âgées ne se parlent qu'entre elles ? Quel est le pouvoir de la béquille, pour que lorsque deux personnes se croisent, jambes dans le plâtre,elles se sourient automatiquement et compatissent l'une pour l'autre ? Alors que le reste de l'année, elles ne prêteront même pas attention à ce pauvre gars qui se débat pour ouvrir une porte, canne dans la main ? 

Cet article est déjà bien trop long, et faut que je vous laisse je dois aller acheter des bananes, je veux regarder les Minions aujourd'hui !





mercredi 10 février 2016

Roule ... ou crève !

Anecdotes croustillantes ... Bonsoir !!

Point de blabla aujourd'hui ! Cet article est le premier d'une série consacrée aux situations drôles (ou pas) vécues grâce à ma maladie.

Le fauteuil roulant :

Situation 1 :

Jour de fac, 7h. Je dois prendre le métro pour m'y rendre. (Point de chauffeur privé ... quelle tristesse !) Début du cours à 8h. Si tout se passe bien, j'en ai pour 25 minutes de trajet. 

Premier ascenseur : en panne. Je décide donc de me rendre à la station suivante (joie intense, il fonctionne !) 

Maintenant il faut sortir du métro. Ascenseur de sortie : en panne. 

Direction le métro que je viens de quitter pour descendre à la station suivante. (ça va les gars ! pas de panique j'ai 30 minutes d'avance !)

Station suivante, ascenseur 1 check. Je me dirige vers les portes réservées aux fauteuils et là ... "monsieur ménage" a décidé de laisser son chariot PILE devant les dites portes.  Et bien entendu personne pour aider. C'est avec une délicatesse extrême que j'ai shooté dedans pour le dégager (Oui je suis en fauteuil mais mes jambes fonctionnent encore un peu, surtout quand je m'énerve !) 
Ascenseur 2 (Effectivement 2 ascenseurs sont nécessaires pour sortir de cette fichue station, et encore là je suis gâtée je n'ai même pas besoin de ressortir dehors pour re-rentrer...si si ça se fait aussi chez nous !)
 Je me dis que c'est bon, je touche au but ! C'était sans compter sur cette petite fille atteinte de trisomie qui avait envie de me taper la discute PILE au moment où je voulais reculer pour sortir de l'ascenseur. 
Une marche arrière en fauteuil ce n'est pas le plus simple, point de rétro, de radar de recul ou de caméra. On fait tout en vision directe ! Après 5 bonnes minutes passées à lui expliquer qu'il "faudrait reculer un tout petit peu sinon je risque de te faire mal", son accompagnatrice intervient en s'excusant platement. (ça va les gars, je suis large j'ai 5 minutes de retard !)

Tel l'oiseau traversant le ciel j'ai fendu l'air à la vitesse de l'éclair pour rejoindre ma fac bien aimée. (Mon fauteuil ne va qu'à 10 km/h ...je me traine)

Cette fois-ci j'y crois c'est la bonne, plus que 5 minutes et j'y suis ! 

Oh mais que vois-je ??? Une voiture garée sur le bateau ? (vous savez cet abaissement du trottoir que les automobilistes prennent trop souvent comme une place de parking. C'est tout de même bien pensé d'avoir abaissé le trottoir pour permettre une ouverture plus aisée de la portière !!!) 

Je suis donc contrainte de faire demi-tour (encore une fois) et de rallonger mon trajet de quelques minutes. 

J'arrive ENFIN, en cours. En retard bien entendu, rouge écarlate (j'ai pas couru mais c'est du sport). 

Le cours se déroule, comme il doit se dérouler, rien de particulier. Le plus drôle est arrivé au moment de repartir. Je démarre et ai une étrange sensation... comme un blop-blop gênant. J'ai crevé ! Si, si, j'ai crevé ! Pas d'autres choix que de retourner au point de départ ! 
Discrétion assurée ! Une roue en moins ça veut dire un fauteuil qui n'adhère pas, qui refuse de tourner, et qui patine. Ajouter à cela un sol un peu mouillé et c'est l'éclate assurée !

Il y a des jours comme ça, où se dit qu'on ferait mieux de se fier aux signes et de rester couché ! 

Ça aurait pu s'arrêter là ... mais ils ont mis une semaine avant de venir me changer la roue. (ça va les gars, je suis large, je n'ai pas de vie !)

dimanche 7 février 2016

Je suis un loup.







Je suis un aimant.

 Un aimant à emmerdes ? Un aimant de gens compliqués ? Un aimant ... 

Vous savez ces personnes que l'on croise et que l'on préfèrerait oublier. Ces gens qui passent dans notre vie, qui nous marquent mais pas pour de bonnes raisons. J'ai parfois du mal d'être de l'espèce humaine : être sociable, être dans le respect, aimer son prochain. Souvent je me remets en question. Peut-être que le monde qui m'entoure ne s'est pas modifié, mais que c'est moi qui évolue ? Peut-être que je suis moins patiente, moins pertinente dans mes jugements. Je me laisse envahir par cette sensation de détester les Hommes. (Avec un grand H, j'ai rien contre les hommes avec un petit h).
Cette sensation de ne pas être à ma place, de ne plus comprendre le monde dans lequel je vis. Au-delà des aberrations de type guerres, terrorisme, irrespect... c'est juste la manière d'être de certains qui me dépasse. 

Pour la majorité des personnes je suis une inconnue. (Si, si je vous l'assure pas besoin de lunettes noires ni de garde du corps...) Je suis donc noyée dans les 7 400 254 446 personnes vivant actuellement dans le monde. (A l'instant T la population mondiale est celle-là, elle varie à chaque seconde mais passons...)  
La probabilité de croiser quelqu'un que je connais dans ma ville natale est nettement plus élevée qu'en Hongrie (J'ai dit Hongrie par hasard, ça aurait pu être Australie ou tout autre pays de votre choix...). Vous me suivez toujours ? Donc... la probabilité de croiser quelqu'un que je connais dans la ville dans laquelle je vis depuis presque 8 ans est également un peu plus élevée mais moindre que dans ma ville natale. En tenant compte de ces paramètres, quelqu'un peut-il m'expliquer pourquoi je me retrouve à devoir écouter des conversations lunaires de personnes totalement inconnues ? 
J'ai bien conscience que le propre de l'Homme (oui toujours avec un grand H...) est de se sociabiliser mais je n'y arrive plus. 

Les gens se confient comme si nous nous étions toujours connu. 
Je vais vous révéler un truc en exclu :  je ne suis pas psy et encore moins curé.
  
J'ai partagé pendant quelques jours ma chambre d'hôpital. Cette situation peut rapprocher, j'ai fait connaissances de quelques personnes par ce biais. Mais toi, voisine ... je ne t'ai envoyé AUCUN signal de rapprochement. J'ai laissé le mince rideau nous séparant bien tiré. Je t'ai dit bonjour le plus poliment possible mais je ne t'ai pas demandé pourquoi tu étais là, ni si tu avais des enfants...je ne t'ai pas fait la causette. Pourtant tu as décidé de m'appeler "ma puce" et "ma chérie". Affectueux ? Peut-être mais je ne suis rien de tout ça pour toi... Les mots ont encore un sens dans ma tête et je n'avais pas envie de tes surnoms. Tu t'es sûrement dit que ça m'intéressait de savoir que tu avais deux fils, que le petit dernier était ton chouchou, que tu étais divorcée d'un Italien, que tu avais choisis la femme de ton fils mais que lui en avait choisi une autre, que tu souffrais plus que quiconque... Tu m'as supplié de ne pas partir (ah ah comme si on m'en laissait le choix ...) mais je n'avais qu'une hâte c'était de quitter cette chambre, et toi par la même occasion... et je n'ai pas réussi à te dire d'aller te faire voir. 

Et toi, patiente en salle d'attente. Je m'étais installée tranquillement dans mon coin, sans demander mon reste. Tu as attaqué ne te préoccupant pas de savoir si j'étais occupée ou non. Tu m' as parlé de ta fille, de ton fils, de ta petite fille, des poux de ta fille, de ta cirrhose au foie, de l'augmentation du prix des autoroutes, du poulet colombo trop épicé et qui devait venir de Colombie, de ton télé deux semaines, de tes hémorroïdes, du régime sans résidu trop difficile à tenir pendant 4 jours, de tes douleurs, de cette dame qui prenait toutes les décisions et qui devait avoir un sacré niveau de bac (c'était ton médecin ! Il vaut mieux qu'elle ait un "sacré niveau de bac"), du baptême de ta nièce où tu as bu mais c'était la faute de ta sœur aussi, de ton père décédé... Tu m'as parlé de ta vie, en long, en large et en travers... Et moi je m'en fichais... J'ai fait semblant de t'écouter, je n'ai pas osé non plus te dire que je m'en tapais le coquillard...J'ai été souriante et polie alors qu'au fond de moi je te détestais... 

Toi, cliente d'un supermarché, qui me parle de tes nems crabes-crevettes, mais qui pense que du crabe il ne doit pas y en avoir tant que ça dans ces nems, peut être juste les pinces tout au plus... Tu reviens, tu m'as cherché dans tous les rayons pour me demander mon avis entre deux paquets car avec cette lumière tu ne vois pas bien. Alors, lequel de paquet ? 
Si tu savais... Je t'ai indiqué le paquet qui m’inspirais le plus confiance , tu avais envie de parler ... et moi non. C'est dur de se faire aborder sur du nem et d'enchainer sur tes problèmes de vues. 

Alors à vous toutes, qu'est ce que je dois faire ? Arrêter de "sembler" avenante ? Qu'est-ce qui vous attire ? Je n'arrive pas à vous dire que votre vie ne m'intéresse pas ... j'essaye de faire semblant mais je n'y arrive vraiment plus. 
A toi coloc' de chambre, comment tu l'aurais vécu si je t'avais répondu que ta douleur je n'y crois pas tant que ça ? Que tu joues plutôt bien la comédie mais qu'en vrai je ne t'aime pas ? 
A toi patiente de salle d'attente, si je t'avais dit que le régime sans résidu c'est mon quotidien et que si mes problèmes s'arrêtait à un télé 2 semaines je me sentirais plutôt bien. 
Et toi, cliente d'un supermarché, si juste pour rigoler je t'avais montré mon cathéter en te disant que tes nems je m'en fiche car je ne peux pas les manger ? 
Est-ce que c'était cruel de faire ça ? Est-ce qu'on doit toujours être poli et aimable ? Est-ce que des fois je peux vous dire que je m'en moque royalement ? 

J'ai du mal de dire ce que je ressens. Je ne veux blesser personne. Pas les inconnus,  pas les médecins, pas ma famille, pas les connaissances, pas mes amis ... Je me contiens... Mais un jour je vais exploser et je le sais. 

L'homme est un loup pour l'homme ... Je l'observe de plus en plus. Chacun cherche à s'identifier à l'autre tout en s'en dissociant. Est-on à ce point seul que l'on devient capable de déballer sa vie sans aucune retenue à un parfait inconnu ? 
Nooon, nous en sommes seulement au point, où je passe par un blog pour exprimer mes ressentis... tout va bien !


vendredi 5 février 2016

Etre ou ne pas être ...




Je suis de retour. Je m'étais octroyée une petite semaine de vacances avec : petit déj' au lit, personnel aux petits ognons (si j'ai le droit ! comprendra qui voudra), suivi diététique. Je sais ça fait rêver, mais ne soyez pas trop jaloux, toutes ces prestations sont disponibles...à l'hôpital ! (Ahah je vous ai bien eu !)

Breeef, qui dit hôpital, dit nouvelles rencontres, dit anecdotes croustillantes, dit matière pour mon blog. Où que je sois je pense à vous ! 

Hier, j'ai pu rentrer chez moi. N'ayant pas de véhicule, c'est un taxi qui est venu me chercher. (Telle la princesse attendant son carrosse... mais il n'y avait pas de prince charmant dedans !)
Après m'être fait prestement virer de ma chambre, on m'a gentiment demandé de patienter en salle d'attente. J'ai donc attendu une bonne heure avant d'apercevoir une petite tête se pencher dans le cadre de la porte.

-"Mademoiselle...BrioLchette ?" (ah oui, je vous avais dit que c'était dur comme nom de famille...)
-"OUIIIIII" (J'étais heureuse, on allait enfin me délivrer de mon donjon !) Je m'empresse donc d'attraper mon sac, mon mant...
-"Euh non attendez ! Il faut que je récupère quelqu'un en même temps... vous avez encore 5 minutes".

Tel le soufflé à l'ouverture du four, ma joie est retombée. J'ai re-attendu. Il est réapparu, 15 minutes plus tard, seul, me demandant de le suivre pour aller faire la sortie. Toute fière je lui réponds que de mon côté tout est bon, j'ai été une bonne petite malade habituée et que les papiers sont prêts ! On peut paaarttiiiiir !

"Non il faut aller faire les papiers de la dame qui vient avec nous".

Je le suis donc au bureau des entrées, et patiente encore. Une fois la tâche ultime effectuée, nous partons dans le dédale de couloirs pour rejoindre la sacro-sainte automobile. (Bon en vrai on longe un couloir toujours tout droit mais raconté comme ça c'est moins passionnant.)

Nous arrivons donc au parking le plus éloigné du bâtiment dans lequel nous nous trouvions. Il me demande de m'installer et me dit :
" Je vais avancer la voiture au plus proche, car la dame qui vient avec nous est en bien moins bon état que vous !"

HEIN ? QUOI ?  Tu viens de me faire traverser l'hôpital, j'ai du te suivre partout pour QUOI ? Retourner au point de départ ? Tu te ris de moi n'est ce pas ?

Et bien non il ne plaisantait pas, nous sommes retournés au point de départ : en voiture.

Pendant que nous attendions encore, j'ai cogité. Il s'agissait d'une dame d'une soixantaine d'années, qui avait décidé de manger avant de partir. (Ah non mais allez-y j'ai le temps ! Vous ne voulez pas faire une petite sieste ou prendre un petit café non plus ? ) Bon déjà, ce point là m'a énervé. Ok il était midi, ok c'était l'heure de manger, mais elle habitait à 30 minutes de là... Elle aurait pu se restaurer à l'arrivée, ne me dites pas que le couscous de l'hôpital lui aurait manqué !!

Puis j'ai réfléchi à ce que tu m'avais dit toi, taxi. "Elle est en moins bon état que vous".
Qu'est-ce qui te permettait de dire ça ? Tu ne connais pas notre passif, ni notre état de santé : c'est le secret médical.
Tu te fies à quoi ?
Elle est arrivée en fauteuil roulant, prêté par l'hôpital certes, mais tu ne sais pas que moi j'en ai un à domicile.
Qu'est-ce qui dans nos attitudes t'as donné le droit de me faire tourner en rond pendant 10 minutes alors que tu lui sers ta voiture sur un plateau ?
Parce que je souris ? Parce que je suis jeune ? Parce que je ne te montre pas que j'ai mal ?
Pourtant j'étais fatiguée aussi, et je n'avais pas envie de retourner au bureau des entrées alors que j'avais tout fait pour partir le plus vite possible, je n'avais pas envie de traverser l'hôpital pour rien puisque nous sommes revenus là où nous étions.

De nombreuses fois on a considéré que j'allais bien sans me demander mon avis. On m'a refusé le droit de prendre un ascenseur parce que "j'étais jeune", que je pouvais bien faire un effort tout de même non ? On m'a traité de menteuse lorsque j'ai montré ma carte d'invalidité.  On m'est passé devant à la caisse car je me portais vraiment bien, et que la dame ELLE, elle est en fauteuil !
Moi, le moment où j'ai le plus besoin des priorités c'est finalement lorsque je n'y suis pas ...en fauteuil. Je fatigue, j'ai mal et je veux juste rentrer chez moi.

Alors toi, taxi, contrôleur des transports, caissière, passant : Arrêtes de juger si tu ne sais pas. Ne te fies pas à ma tête pour savoir si je vais bien. Arrêtes de hiérarchiser les gravités sur un simple visuel !

Parce que oui, hier, j'étais fatiguée et je n'avais pas la sensation d'être en vraiment "meilleur état" que la personne qui nous accompagnait...