jeudi 27 octobre 2016

Au bout du rouleau !



Ca y est ils m'ont usé. 

Le peu de patience qui j'économisais gentiment a été décimé en deux jours. 48 heures. Deux fois 24 heures. Bref deux "tout petit" jours.

Il faut dire qu'en quelques mois il s'en est passé des choses. Hospitalisations, grosses blagues médicales, mais il faut avouer que le côté administratif n'était pas encore entré en jeu de manière conséquente. Et bien aujourd'hui je ne peux plus dire ça ! (Lance les applaudissements Marcel !!!) 

En vrai ça a commencé il y a une semaine et demie. (Oui j'aime les moitiés) Fin des antibiotiques, retour à la maison. (Normalement vous avez du suivre tout ça ! Sinon c'est par, et ). Et puis un soir, comme ça sans prévenir, le retour de la douleur du Broviac. (ça ne vaut pas le retour du Jedi !)  
Du coup, en gentille patiente, j'informe l'hôpital que la zone est de nouveau enflée, qu'elle est de nouveau rouge et surtout qu'elle est de nouveau douloureuse.Et puis comme je les connais bien (Oui en un an et demi on créer des liens), je précise que je n'ai pas de fièvre, pas de frisson, que les perfusions se passent bien, et que j'ai envie de chocolat (Bon ça ok je ne l'ai pas dit, pourtant c'était l'information la plus intéressante !) 

On me répond qu'il faut surveiller et prévenir en cas d'aggravation. 

Bien. 

Une semaine passe, (Je vous fais l'historique sinon vous n'allez rien comprendre !), et sentant que mon cas les préoccupe beaucoup, je me permets de les informer de mon état stationnaire. (Ben quoi peut-être qu'en vrai ça aurait pu les intéresser !)

On me répond qu'il faut surveiller et prévenir en cas d'aggravation. (Et qu'on fera le point après le week-end). 

Bien. 

Le week-end passe, et dans ma petite caboche je me demandais "Mais du coup, on fera le point... C'est moi qui fait le point ou c'est eux ?" 
Pour vous mettre dans l'ambiance c'est un peu comme quand vous avez un nouveau rencard, et que vous vous dites "On se rappelle". Les heures passent et sans nouvelle de  votre nouveau double, vous êtes dans le flou le plus total. Souhaite t-il vous revoir ? Vous a t-il oublié ? ("Il" c'est le double, vos préférences sexuelles ne me regardent aucunement) Est-ce que si c'est moi qui prend l'initiative de l'appeler je vais passer pour plus lourdeau que je ne le suis ? Bref... C'était la panade ! Et finalement le destin est venu me tirer tout seul de cette expectative. 
Lundi en faisant mon pansement, je me suis aperçue que ce n'était absolument pas propre (clairement c'était dégueu, au point que j'ai eu envie de vomir... Et ce n'est pas une image !). J'ai donc envoyé une jolie photo (autant qu'on puisse le faire avec un amas de pus), à mes médecins préférés. C'était donc le moment de faire le point ! 

Là plus question d'attendre une aggravation, on me somme de me rendre dans le service dès le lendemain afin de pratiquer quelques prélèvements. En toute innocence j'ai demandé si je devais amener le pansement que j'avais soigneusement gardé. (Ben quoi, vous n'auriez pas fait pareil vous ?). On m'a dit non ! J'ai raccroché et j'ai suivi les ordres. 

Le lendemain je me rends dans un hôpital flambant neuf dans lequel avait été déplacé mon service. Bon en fait, c'est moche, vieux et triste. Mais on va essayer de ne pas se rajouter d'obstacles psychologiques inutiles et on va pratiquer la méthode Coué. 
Une fois sur place, je ne peux bien entendu pas échapper à une étape rébarbative mais Oh combien essentielle... J'ai nommée : la création des étiquettes. (Un vulgaire bout de papier autocollant comportant un code barre qui vous ouvre toutes les portes. C'est le pass ultime ! C'est la poudre de la fée Clochette, le terrier d'Alice, bref si vous ne l'avez pas le monde secret des hôpitaux ne s'ouvrira jamais à vous !)

 J'étais habituée au standing de mon ancien lieu de villégiature, avec écran d'affichage, distributeur élèctronique des numéros de passage, et même des sièges. Premier changement, un distributeur mécanique (le même que chez le boucher quand j'étais petite, avec les petits bouts de papier qui se déchirent mal !) Des espèces de bancs mis en équerre, de sorte à ce que vous vous fassiez du genoux avec votre voisin d'infortune. (Peut-être une technique pour créer des couples ! Ils se sont dit que l'hôpital serait au moins une sortie commune !) L'affichage était lui aussi d'un autre âge puisque les numéros changeaient grâce à de petits volets tournoyant joyeusement. (Comme sur les terrains de Basket quand j'étais petite, le bruit étant à l'identique lui aussi). Bref que de changement ! Heureusement, une chose était similaire : des bureaux derrière lesquels aucun employé n'était présent ! Ouf tout n'est pas perdu ! 
Ayant rendez-vous entre 9h30 et 10h (Je ne sais pas si la marge me concernait ou si elle correspondait  à l'heure d'arrivée approximative du médecin... m'enfin... Je ne vais pas être mauvaise langue, ce n'est pas mon genre !) J'étais sur place à 9h. (La peur d'être toujours en retard, sait-on jamais qu'un jour on nous prenne à l'heure !) Je suis donc partie faire mes étiquettes tranquillement. J'ai pris mon ticket. Numéro 932. L'affichage indiquait le 220. (Ah oui quand même !) J'ai donc regardé mon ticket qui m'indiquait 12 personnes devant moi. (Pourquoi on s'embêterait à changer le chiffre des centaines hein ?)  12 personnes, une demi heure à une heure devant moi... (Entre 9h30 et 10h), j'étais large. 
Et puis je me suis aperçue qu'il n'y avait qu'un seul et unique guichet d'ouvert. Ca pouvait donc être long ! (Est-ce que l'hôpital fonctionne comme Carrefour ? Pour plus de 10 minutes d'attentes on ouvre une nouvelle caisse ? Apparemment... non !) 
J'ai fini par obtenir le Graal, au bout de 40 minutes d'attente.

De là s'est découlé une consultation somme toute classique :

- Donc vous nous rappelez un peu l'historique... 
- Hum oui donc ça fait une semaine et demie que j'ai très mal, c'est enflé, parfois rouge, et depuis hier ça coule. 
- Ok. Bon de toutes façons vous avez tout le temps mal non ? 
- Ben euh non, régulièrement mais pas tout le temps et puis comme en plus ça coule... 
- Oui ben on va faire un prélèvement, mais bon c'est moins moche qu'hier, ça fluctue chez vous. Et puis vous réagissez tout de suite quand on vous enlève le pansement alors c'est trompeur pour les rougeurs. Le mieux serait de nous faire une photo avant d'enlever le pansement. 
- ...
- Oui ? 
- Ben c'est à dire que je ne vous envoie des photos qu'en voyant l'état du point de ponction et la salissure du pansement... Alors faire une photo avant... 
- Ah oui du coup vous pouvez pas deviner... (Ben ouais voilà c'est ça, je ne suis pas encore Madame Irma). Bon le prélèvement est fait. On va trouver une bactérie de toute façon mais bon... Mettez cette crème pendant 7 jours et puis voilà. -(Ah c'était utile tout ça ! J'ai bien fait de prendre deux métros et un bus !)

Bref, une consultation somme toute classique.

Ce matin, j'avais un examen à passer à 8 heures. Muni de ma convocation, je me dirige donc vers le bureau des entrées pour réaliser les étiquettes. (Je vous ai dit que c'était un incontournable. Je pars de chez moi à 6h30, affronte la nuit, le froid, trois métros (ce n'était pas le même hôpital qu'hier). J'arrive à 7h15 devant le bâtiment. (45 minutes pour réaliser le sésame, et trouver le service, je me sentais bien !) Premier déboire : le bureau des entrées n'ouvre qu'à 7h30. Qu'à cela ne tienne, je plante ma tente comme les autres patients devant les portes et attends. A 7h35, les portes s'ouvrent. (Hé les gars, 5 minutes dès le matin ça se transforme vite en 2 heures en fin de journée !) Je suis le patient 003 ! Et j'ai 0 patients devant moi (La magie de la répartition auscultation, hospitalisation !) Me voilà appelé au guichet G, je fonce. En passant devant le guichet H la dame m'interpelle, je lui dis que le tableau d'affichage m'indique sa collègue, elle s'excuse, je m'installe. La dite collègue était à peu près aussi aimable que Cruella et Ardisson réunis (Désolée pour les fans respectifs !)Extrait (Ouais rien ne sert de blablater, un bon extrait vaut tout l'or du monde) : 

- Je vais prendre vos petits papiers ! 
- BONJOUR ! Les voilà... 
- Vous allez dans quel service ? 
- Cardio, j'ai rendez-vous à 8 heures. 
- Vos petites coordonnées n'ont pas changées ? 
- Non. Ah et je voulais vous demander, j'ai un autre rendez-vous la semaine prochaine, est-ce qu'on peut faire les étiquettes en même temps. (Aie aie ambitieuse la fille !)
- C'est dans quel service ? (En fait en y réfléchissant c'était plutôt Germaine de Monstres et compagnie...)
- Maladies infectieuses mais c'est pour une IRM... 
- Ah mais non faut faire directement dans le service, ils détachent des gens là bas pour ça, parce qu'ils veulent être indépendants... 
- Ah... Pourtant la cadre de santé m'a dit de tout faire ici c'est pour ça... Je... 
-La cadre de santé faut qu'elle arrête... 
- Ok, pas de soucis je ferais ça là-bas (Je ne comptais pas déclencher un incident diplomatique !) 
- Puis vous avez rendez-vous à quelle heure ? Oui, ben vous aurez le temps pourquoi vous voulez les faire maintenant ? 
- Ca m'évite de venir plus tôt la prochaine fois... Mais ce n'est pas grave, laissez, ça ira ! (Je vais rentrer dans mes PETITS souliers !)
- Bon ben je vais le faire, mais c'est bien pour vous rendre service. ("Germaine ! Vous êtes sublime ! Une limace dans un écrin ! Une nouvelle coupe ? Sans blague vous êtes rayonnante ! C'est quoi ? Un léger trait sous la paupière ? Des U.V ? Un grand lifting avec des tendeurs ? Un décollement de racine ? Ca vous donne un air tellement...tellement...tellement...") 
- Merci beaucoup et je voulais vous demander aussi (Aie aie audacieuse la fille !), je suis inscrite sur le site qui permet de faire les étiquettes en avance, pour certains services ça se fait automatiquement mais pour d'autres ça ne fonctionne pas... Il faut que je remplisse quelque chose ? J'ai oublié quelque chose ? 
- Ah non vous ne touchez à rien hein ! ("Germaine ! Ma gracieuse limace en jartelle ! A qui allons-nous faire peur aujourd'hui ?") C'est nous qui faisons, mais on n'a pas le temps hein ! 
- Ah ok. C'est dommage c'est pratique ! (chuuuuuuut tais-toi malheureuse)
- Pratique ! C'est ça ouais. 
- En tous cas pour nous, patients. 
- Oui, ben c'est sûr mais eux ce qu'ils veulent c'est supprimer le bureau des entrées hein rien d'autre. (Ah et donc c'est pour ça que vous ne faites pas les étiquettes en fait, pas par manque de temps, mais par crainte. Vous voulez qu'on en parle ? Ça fera 60 euros la séance, mais avec les étiquettes vous pouvez être remboursée... ) 

Bref, j'ai eu mes étiquettes, à 7h50 j'étais devant le service cardio. A 8h05 quelqu'un était à l'accueil (euh les mecs 5 minutes... Deux heures en fin de journée...). Et là on me dit que je ne suis pas sur le planning. Et qu'en plus j'ai du me tromper de date parce qu'il n'y a aucun médecin angiologue présent. Ah ben... c'est ballot ! J'ai donc demandé si nous étions bien le 27 octobre. On m'a répondu par l'affirmative. J'ai demandé si je me trouvais bien dans le bon bâtiment, et le bon service ? On m'a répondu oui. J'ai tendu ma convocation et on m'a rétorqué "Ah ben ça doit être la cadre (encore elle ?) qui s'est trompée ! On va regarder sur l'ordinateur. 
Je ne sais pas pourquoi mais là on m'a dit que je devais aller en radiologie, et être présente 20 minutes à l'avance. Euh.. Ben il est 8h15... J'avais rendez-vous à 8 heures... Personne ne m'a rien dit, ça me semble compliqué de remonter le temps. (Dr WHO une solution ?)

J'ai donc couru (bon ok marché d'un pas rapide, bon ok marché) jusqu'à la radio, et suis arrivée à l'accueil...vide. (C'est une manie ou bien ?) Un patient avec un bout de ouate dans chaque narine me dit qu'il m'envoie l'infirmière mais qu'elle est en train de l'installer. (Elle vous installe sans vous ? Moins pratique du coup...) Une dame en blouse passe, me demande ce que je veux, je lui explique et elle me répond "Ah ben ça à l'air compliqué votre histoire, mais vous direz ça à ma collègue moi je ne m'occupe pas de ce secteur" ..... (Je n'invente rien, ce sont des faits réels, croix de bois, croix de fer et tout le tintouin !) 
Bref je patiente de nouveau, j'explique de nouveau et on me dit qu'on va m'installer. Finalement à 9h, personne ne sait ni quoi faire de moi, ni ce qu'on demande. (Et moi non plus...) 

Le médecin vient me chercher en disant qu'elle a vu avec l'interne, qu'elle va réaliser une écho et essayer de voir les veines comme elle peut, que ça sera "mieux que rien mais qu'elle n'est pas spécialiste". (Euh sinon je peux y aller !)

A la fin de l'examen, la doc me dit "Bon il faudra reprendre rendez-vous en cardio, pour le même examen qui était marqué initialement sur votre convocation !" 

Je suis repartie en ayant l'impression qu'on me prenait pour une truffe, mais finalement à l'approche de Noël, est-ce vraiment si étonnant ?

PS : Pour l'image je voulais mettre Germaine de Monstres et Cie mais j'essaye de respecter les droits d'usage et Pixar ils sont pas ouverts ouverts là dessus... Du coup j'ai mis une Limace classique, c'est bien aussi et surtout c'est libre de droits ! Loin de moi l'idée de vous prendre pour des truffes ! Mais au fait, vous avez vos étiquettes ?

lundi 17 octobre 2016

Ma vie de patiente Acte 3 : La désolation

Nous y voilà, l'acte 3, l'acte final, que dis-je, le dénouement de ces trois semaines et demi d’hospitalisation ! 

Du mardi 4 octobre au jeudi 13 octobre : 

Alors que je pensais mettre un terme à ma colocation en commettant l'irréparable, une aide extérieure m'a été proposée. La nature est tout de même bien faite ! (Rooh mais non, elle n'est pas décédée, j'ai déménagé !) 

J'ai donc refait mon paquetage pour la quatrième fois en quelques jours. Le nom du service était flatteur, il promettait soleil et bonne humeur. Direction "Les maladies infectieuses et tropicales" ! (Ben quoi y a tropique quand même ! Vous vous attendiez à quoi ? Ça promet tout de même plus d'exotisme qu'un service où les coloscopies sont le Graal des examens non ?). En vrai, je savais à quoi m'attendre puisque j'y avais déjà séjourné. J'en gardais un plutôt bon souvenir. (Trucs et astuces de l'hôpital : Toujours se limiter, autant que possible, à vos souvenirs. Retenter l'expérience dans un service ou d'un examen qui vous avait semblé "plutôt sympathique", peut s'avérer être une très très trèèèèès mauvaise idée.) 

Première bonne nouvelle : la colocation est désormais définitivement terminée ! Je rejoins une chambre seule. J'ai donc tout le loisir d'écouter la télévision, de lire, de sortir quand bon me semble ! 

J'ai vite déchanté...Et j'ai vite pris conscience que ce qui fait notre bien-être à l'hôpital est déterminé par plusieurs composantes. 

1) Une chambre accueillante. Ne vous attendez pas à la suite de Kate.... mais avoir un vrai lit est déjà un bon commencement (pour avoir passé des nuits sur des brancards aux urgences, je peux vous assurer qu'avoir un lit c'est chouette !) . Disposer d'une salle de douche (Avec un peu de chance vous aurez même une cabine de douche, mais alors ça c'est rare et c'est du luxe !) et de toilettes, est également appréciable. Enfin, la télévision (que vous payerez la modique somme de 5 euros par jour. Si, si c'est cadeau !) est le caviar du séjour. (Sinon vous pouvez faire des mots fléchés, c'est bien les mots fléchés !) 

2) Un personnel à l'écoute... Et compétent, cela va de soi. Il est toujours plus facile de dire que l'on souffre à un être humain qui vous considère d'égal à égal. Je sens que vous voulez un exemple vous ! Bon... ok.. Mais alors on va faire ça sous forme de petit jeu. 

Je vais énoncer des situations (qui sont toutes déjà arrivées bien entendu, et vous devrez définir si selon vous, c'est une bonne attitude ou une mauvaise attitude. Il n'y a pas de pièges, mais il faut être bien attentif et se rappeler des règles simples de vivre ensemble.

Cas 1 : La fameuse prise de tension (oui encore et toujours elle !). 

Situation A : 

Une personne en blouse entre dans votre chambre. (C'est un bon indicateur la blouse, parce qu'il arrive que des gens entrent dans la chambre mais soient de parfaits inconnus... Ils regardent partout dans la chambre, pour finalement s'apercevoir qu'ils ne sont pas dans la bonne ! Et ça arrive plus souvent qu'on ne le pense !) 
 Donc une personne en blouse entre dans votre chambre, une drôle de machine à la main. Sans un bonjour elle vous demande de tendre le bras, vous enroule un bout de tissu froid autour, vous accroche une pince au bout du doigt et dans le même temps vous fourre un thermomètre dans la bouche ou dans l'oreille (Les deux sont tout à fait possible !) Elle vous laisse ensuite plantée là, pianotant sur son ordinateur dans le couloir. Au bout de quelques minutes elle revient, récupère son matériel et s'en va. 

Situation B : 

 Une personne en blouse entre dans votre chambre, une drôle de machine à la main. Elle lance un bonjour amical et chaleureux. Tout en installant son matériel, elle vous explique qu'elle vient prendre vos constantes. Pendant que le tensiomètre fait son travail, elle échange quelques mots avec vous. Elle vous annonce ensuite qu'elle va prendre votre température. Puis sort en susurrant un "A bientôt". 

D'après vous, quelle situation est la plus correcte ? (Chuut gardez, la réponse pour vous, vos petits camarades n'ont peut-être pas encore trouvé ! Faut dire que c'est pas facile facile !)

Cas 2 : Le respect du sommeil

Situation A : 

Une personne en blouse (oui toujours ! Surtout pendant la nuit sinon faut vraiment vous poser des questions !) entre dans votre chambre de manière discrète et silencieuse. N'ayant aucun soin particulier à vous faire et ayant constaté que vous dormiez paisiblement (et donc que vous respiriez toujours), cette personne refermera la porte calmement. Elle ne reviendra plus pendant la nuit (sauf si soins particuliers bien entendu) et réapparaitra le lendemain matin aux alentours de 7 heures. (Horaire largement acceptable dans une vie à l'hôpital !)

Situation B :

Une personne en blouse, entre dans votre chambre à 23h45 avec une voix forte (C'est à dire un volume adapté à  la criée sur le port, ou sur le marché de Saint-Denis) et avec un dynamisme inadapté (C'est à dire quand tu sens que la porte sera bientôt dégondée), pour finalement vous lancer non nonchalamment : "Hé bonjour à ma patiente préférée !!! Elle pleure ? " (Non elle dormait mais c'est vrai que la frontière est mince entre ces deux verbes ! Et peut-on décréter une préférence après seulement quelques minutes passées en commun ? Non parce que dans ce cas-là j'adore Vincent Lindon, je l'ai aperçu dans une voiture pour de vrai ! (mais vraiment pour de vrai hein !)) 
"Bon ben j ai rien à vous faire. L infirmière m avait dit de vous laisser tranquille car j allais sûrement vous réveillez mais fallait bien que je vous dise bonsoir hein !' (Ben oui, ça aurait été dommage de laisser dormir tranquillement ses patients !) 
Enfin et pour couronner le tout, cette même personne trouvera adapté de venir changer un pommeau de douche à 5h30 du matin. (Pommeau qui doit être changé toutes les semaines pour des raisons d'hygiène et dont le remplacement, montre en main, dure 15 secondes.)

 D'après vous, quelle situation est la plus correcte ? 

Cas 3 : L'écoute et la considération du patient 

Vous êtes une personne régulièrement hospitalisée. Vous connaissez donc parfaitement votre corps, les soins qu'on vous prodigue (et peut-être même que vous les pratiquez vous-même dans votre maison parce que vous avez été formé pour !), et vous comprenez le jargon médical. (Enfin, en règle générale.) Un infirmier doit vous poser un cathéter ou faire une énième prise de sang.

Situation A : 

Vous lui expliquez que les seules veines qui fonctionnent encore se trouvent sous les poignets et sur la main. Bien que l'infirmier n'aime pas piquer à ces endroits en règle générale, il vous fait confiance et y va franco. Bingo ! Cela fonctionne.

Situation B :

Vous lui expliquez que les seules veines qui fonctionnent encore se trouve sous les poignets et sur la main. L'infirmier vous rétorque que vous semblez avoir de bien jolies veines, que vous êtes jeune et que ça a l'air trop fastoche de piquer, et que lui en plus il SAIT faire ! Tâtant à tout va, il choisi sa proie. Il ouvre un laaaaarge bec et... (Ah non pardon, je me suis perdue !) 
Il détermine donc la veine la plus propice. Une fois la grande gagnante trouvée, vous lui répétez encore une fois que c'est peine perdue, que ses collègues ont déjà essayé et que les veines gognent (Interrogation surprise ! Que veut dire Gogner ???)
Avec un joli cathéter rose, il se concentre de toutes ses forces. (Alors le choix du cathé, ok ou bien .... ?) Et bam, la veine cède ! (Loin de vous l'attitude goguenarde !) Le pensant repenti, vous tentez désespérément de lui rappeler l'astuce de vos veines peu sollicitées. Mais c'est bien mal connaitre l'infirmier fier et vaillant (ou pas) qui repart à l'attaque d'une nouvelle veine à traumatiser. Au bout de 3 (voir 6 essais parfois), il convient que vous aviez peut-être raison et fini par vous écouter. (C'est d'ailleurs ce qui le mènera à la réussite !) Enfin, ce même infirmier affirmera lors de la relève du matin (ben oui il est venu à 5 heures du matin faire son petit prélèvement) qu'il ne vous a jamais piquée. (Et oui conscience professionnelle quand tu nous tiens !)

 D'après vous, quelle situation est la plus correcte ? (J'ai jamais dit que c'était facile !) 

Cas 4 : Le respect des protocoles 

Vous êtes une personne régulièrement hospitalisée. Vous connaissez donc parfaitement votre corps, les soins qu'on vous prodigue (et peut-être même que vous les pratiquez vous-même dans votre maison parce que vous avez été formé pour !), et vous comprenez le jargon médical. (Enfin, en règle générale.) Oui je récapitule ! Dites donc vous, pendant que vous passiez le code, est-ce que vous avez dit quelque chose à la petite voix qui répétait toujours la même chose ? Est-ce que ça vous semblait si incohérent que ça qu'elle vous serine alors qu'un gros feu rouge était affiché : A) Je m'arrête B) Je ralentis. C) Je ralentis et je passe ? Non je ne crois pas ! Alors ! On peut continuer ? 

Donc vous connaissez vos protocoles puisque vous les mettez en application depuis plus d'un an et demi dans votre doux foyer. En constatant que ces derniers ne sont pas respectés vous vous interrogez. (Et vous flippez aussi parce que c'est un tout petit peu avec votre vie qu'ils sont en train de jouer !)

Situation 1 : On vous dit que tout est normal. Qu'ils ont l'habitude de travailler. L'une des blouse blanche vous propose même de se mettre en stérile (c'est à dire de porter un masque, une blouse, une charlotte, des gants  et d'utiliser du matériel emballé en utilisant une méthode bien particulière pour ne pas tout souiller) pour vous faire plaisir. Malgré vos invectives et vos tentatives désespérées pour lui faire comprendre qu'il ne s'agit pas d'un caprice mais bien d'une nécessité, il continuera à vous faire comprendre que c'est bien "pour vous faire plaisir". (Oh vous lecteurs masculins, arrêtez d'emmener vos copines aux restos et ne leur offrez plus des fleurs ! Non, pour leur faire plaisir mettez vous donc en stérile, vous verrez effet garanti !) 
Pour justifier d'un manque de rigueur (parce que oui, c'est bien de ça qu'il s'agit), on vous rétorquera que le personnel ne dispose pas de suffisamment de temps ! (Ha ben ma p'tite dame, c'est à dire que votre maison elle n'a pas de toit, mais c'est qu'on n'a pas suffisamment de temps NOUS pour poser les tuiles ! Déjà on vous a mis la charpente, c'est pas mal, mais c'est bien POUR VOUS FAIRE PLAISIR !)

Situation 2 : Ben en fait y en n'a pas parce qu'on ne m'a jamais écouté ! 

Du coup je ne peux pas vous demander quelle situation est la plus respectueuse, mais je vais vous poser une colle tout de même. 
A votre avis, le manque de temps justifie-t-il également, le fait qu'on mélange toutes les substances dans une unique perfusion ? En clair, est-il acceptable de passer tous les fluides en même temps sans aucune précaution sur la compatibilité des produits ? (Oh non ils ne l'ont pas fait hein c'est juste pour savoir... Ha ben si en fait... Ils l'ont fait aussi...) 

Bon et pour finir, un troisième point essentiel à une hospitalisation vécue de manière positive : 

3) Des médecins compétents... Et à l'écoute cela va de soi (Ah on me dit dans l'oreillette, que non en fait !) 

Loin de moi l'idée de juger de la compétence d'un médecin ou d'un autre. Surtout quand ce dernier est encore en étude... Qu'il a devant lui un récapitulatif de vos antécédents et qu'il est incapable de comprendre ce qui est écrit... Non, non, non, pas de ça chez moi ! 

En revanche... pour l'écoute ? Hum...Bon je sens que les cas pratiques ça vous plait. Dernière petite interrogation pour terminer ce palpitant chapitre. (Vous ne direz plus que le médical ça ne fait pas rire hein !)

Si une patiente expose ses inquiétudes quand aux méthodes utillisées pour manipuler son Broviac (Qui est précieux rappelons-le) à un chef de service. La réponse la plus appropriée selon vous est : (Attention je me suis permise d'imaginer des réponses possibles, ben ouais dans la réalité, y en a qu'on n'entendra jamais... c'est trop gros !) 

Réponse 1 : 

Mais Mademoiselle, je comprends tout à fait vos inquiétudes et c'est pourquoi je vous propose de vous mettre à disposition le matériel nécessaire et de vous laisser manipuler à votre convenance. Vous êtes formée, nous avons donc entière confiance ! 

 Réponse 2 : 

Mais Mademoiselle, vous êtes dans un service infectieux ici je pense quand même savoir éviter les risques non ? Et je fais entière confiance en mon équipe ! 

Réponse 3 : 

Mais Mademoiselle, je vais me mettre en relation avec les médecins de nutrition pour échanger sur nos différents protocoles et réfléchir à la solution la plus adéquate. Nous prenons en compte vos craintes et comprenons ces dernières. 

Vous avez 3 minutes.... 


Le jeudi 13 au matin, la libération, j'ai cru qu'ils avaient été au bout de toutes les bêtises possibles : pas de désinfection avant branchement (ni après hein !), manipulation à risque, tubulures laissées pendues sur la potence pendant de longues minutes (y en a même une qui est tombée !), réveils intempestifs, prises de sang et poses de cathéters tumultueuses. Bref ! Du grand niveau. 

Mais finalement c'est la cadre de santé qui m'a fait le plus rire et qui a mis un point final à tout ça. 

- Bon Mademoiselle Briochette, vous avez vos papiers, vos ordonnances. On vous laisse sortir... Hum sinon vous avez quoi comme voie ?
- Un broviac. 
- Un broviac ok. Donc bon ben vous allez sortir avec...  

C'est à dire que ça m'arrangerait ! Histoire que je ne me sois pas coltinées deux semaines d'antibiotiques pour rien .... 

On aura beau dire, on aura beau faire mais c'est ce genre de petites choses qui vous rappelle combien la vie vaut le coup d'être vécue... Ca serait dommage de ne pas pouvoir en rire une fois rentrée au chaud chez soi non ! J'ai quand même de la veine de pouvoir raconter tout ça ! (Comique de répétition sur la veine ! Je vous l'avais pas dit depuis l'acte 1 ?)

Ps : Je vous laisse réfléchir aux cas ci-dessus, petit corrigé plus tard !

samedi 15 octobre 2016

Ma vie de patiente Acte 2 : La colocation



Petite introduction rapide : si vous tombez sur cet article par hasard sans avoir lu la première partie, vous risquez de ne pas y comprendre grand-chose. (Au risque de vous décevoir je ne suis pas du sud de la France, ne m’habille pas en jaune, et je numérote donc scrupuleusement mes articles. Si je vous dis qu’on en est à l’acte 2, c’est qu’il y a un acte 1, je ne vous piège pas.) Allez, vous êtes prêts pour la suite ? 

Pour vous remettre dedans vous en étiez à la fièvre et aux frissons qui faisaient leur apparition…(Chuuuuut ça recommence !)


Je me résigne donc à utiliser la sacro-sainte sonnette. A peine le bouton relâché, ma porte s'ouvre (Haha, mais non, allez 20 minutes plus tard ?), et l'aide-soignant d'une perspicacité étonnante me dit : 
"Oh vous, ça n'a pas l'air d'aller ! Vous êtes un peu pâlotte, vous voulez manger quelque chose ?" (Roooh la bonne idée que voilà ! Pour ceux qui vont dire : « Ben quoi, tu aurais pu être en hypoglycémie, ce n’était pas bête comme idée », je réponds : « C’est-à-dire qu’avec un œsophage, un estomac et des intestins qui ne fonctionnent que comme bon leur semble, manger c’est moins fastoche ! ») Mais je suis polie et gentille (parfois) alors j’ai répondu ça : "Hum non merci, en fait je ne me sens pas bien, j'ai des frissons". 
S’il y a une chose qu'on ne peut pas leur reprocher c'est que frissons+ nutrition, raisonne chez eux comme un signal d'alerte ! C’est le code rouge, celui qu’il ne faut pas laisser passer : JAMAIS !
"Ok ne bougez pas ! Je reviens" (ça tombe mal, parce que j'avais prévu d'aller me balader un peu dans l'hosto !)

Ni une ni deux, le voilà de retour avec tensiomètre d'une main, et thermomètre dans l'autre. (Tout juste si il n'a pas lancé un "OK. Dr Greene, vous me faites NFS, chimie, iono ! Scan du thorax, IRM de la tête et écho pelvienne… et un café ! ... Seuls les vrais comprendront !)
"Ah ben vous êtes à 130 de pouls, 38, 5 de tempèt' (Si, si j'avais l'impression d'entendre ma maman quand j'avais 5 ans, heureusement qu'ils n'ont pas les mêmes excès quand ils mettent des suppositoires aux patients : Alors un, deux, trois le spoutnik est parti !"). Effectivement c'est pas terrible tout ça ! (En plus il a un accent du sud, il ne manquait plus que les cigales, et le Pinédou qui se boit glace !) Je vais prévenir l'infirmière, je reviens, vous ne bougez pas hein ?" (Oh ben ça tombe mal encore une fois parce que... Ok... Je me tais). 
De là on arrête la nutrition, on pique les hémocultures, on pose une voie périphérique. Vous êtes facile à piquer non ? Ah bon ? Pourtant je sens vos veines... Bon je vais essayer un rose... Oh non ça a gogné... Bon je recommence... Oh ben zut ça ne remonte pas ! Heureusement que j'en ai prévu plusieurs ! Bon tant pis je vais vous poser un bleu sur le dessus de la main ! Bref, la routine ! (Hé, comique de répétition !)

Bien entendu, je sentais que ma sortie au lendemain était un peu compromise. 

Dans la soirée, j'ai fait un malaise vagal. Le malaise un peu fouine, où tu ne tombes pas vraiment dans les pommes (en tous cas pas moi !) mais où tu sens que ton corps n'est plus vraiment le tien. J'avais décidé d'aller au lieu d'aisance après avoir ressenti une grande nausée qui n'annonçait rien de bon. C'est là accroché à mes toilettes que ma vue s'est troublée, que je suis devenue translucide (Non là vraiment ce n'était plus du blanc, même les lèvres n'étaient plus colorées), avec une température interne qui devait avoisiner les 80°C (Au vue de la chaleur ressentie dans mes joues), et que mes jambes ont décidées qu'elles ne me porteraient plus. A ce moment là je ressemblais plus ou moins à ça : (en plus vivante bien entendu…Trop osée ? Ha…)



J'ai donc utilisé pour la seconde fois en quelques heures la sacro-sainte sonnette pour appeler à l'aide. 
Remise dans mon lit, j'ai eu le droit à une visite expresse de l'interne de garde, qui avait l'air vraiment ennuyé de devoir se déplacer pour ça. "Bon, il parait que vous avez fait un petit malaise ? Je suis obligée de venir. (Ah bon ? J’aurais pourtant juré que vous étiez là de votre plein gré et par courtoisie… Comme quoi les apparences !) Ouvrez la bouche, tirez la langue, regardez par là, par là. Ok. Vous sentez là ? Ok. Bon ben c'est un malaise vagal, c'est rien." Et elle est partie.
Tant de chaleur humaine ça vous réconforte ! La médecine avant tout c'est un métier humain, de relation à l'autre, d'entraide, de… Comment ? Pas pour tout le monde ? Ben visiblement non effectivement ! 

Bref après cet épisode mon corps était fatigué. De toute façon, il n' avait plus rien à faire à part attendre les résultats le lendemain alors autant dormir, le temps passerait plus vite.


Mercredi 28 septembre au mardi 4 octobre : 

Les hémocultures ont poussé. On a su qu'il y avait non pas une mais deux bactéries digestives plantées sur le cathéter, et que "Oh bonheur" elles n'étaient pas faciles à traiter. 

Début des antibiotiques… Changement des antibiotiques… Réajustement des antibiotiques. 

Le samedi, j'ai déménagé dans le service de gastroentérologie car le service de nutrition était lui-même en pleine mutation géographique. Il allait disparaitre définitivement de cet hôpital pour aller s'implanter dans un autre. Heureusement, les infirmières d'un service sont les mêmes que pour l'autre (sauf pour celles qui partaient en même temps dans l'autre hôpital, vous suivez ?) 

Petit aparté, l'autre jour une nouvelle lectrice du blog, s'est questionnée à la suite de la découverte de mes articles sur les relations soignants-patients. Il est vrai que j'ai fait le choix de raconter mes aventures, et pour ne rien cacher c'est plus drôle quand il se passe quelque chose. (Prenez le diner de cons, si finalement il avait annulé son programme après s’être bloqué le dos, l’histoire aurait été sans doute bien moins connue ! Bon et puis pour tout avouer, j’ai du mal avec le cinéma d’auteur, les séquences fixes, longues… Chiantes quoi !) Du coup, on a peut-être l'impression que tout le corps médical est mauvais (et c'est pas faux !)  En réalité, j'évoque rarement le personnel soignant qui a une action positive sur les patients. Et pourtant il y en a. Les infirmières de ce service (A l'exception d'une ou deux...Ou comment mettre la panade en ne citant personne), en font partie. Elles prennent le temps de discuter, d'échanger un bout de leur vie, de venir plaisanter ou même chanter (oui, oui !). Elles prennent le temps d'écouter, de rassurer, de se plaindre avec nous des médecins (oui, oui !). Bref elles rendent la vie moins difficile et il est important aussi de le dire alors si jamais un jour l’une ou l’autre passe par-là MERCI !

Allez minute émotion terminée : On y retourne ! 

J'ai donc déménagé et j'ai eu l'immense chance de me retrouver dans une chambre double, avec une mamie de 80 ans. (En règle générale ça ne me pose pas de problème d'être sociable, sauf quand je suis un aimant ,et là…J’en étais un…)

J’entre dans la chambre avec tout mon barda et une pointe d’émotion car je découvre que c’est celle que j’avais eu lors de ma toute première hospitalisation (Nan, c’est pas vrai, c’est mes parents qui me l’ont fait remarqué, moi et mon sens de l’orientation on avait oublié !)
  
Je lance un « Bonjour Madame », qui m’avait pourtant semblé audible. 

Pas de réponse. 

Alors je me raisonne en me disant qu’elle est peut-être sourde et un peu aveugle (Si quand même je ne suis pas si mince, on voit encore quand j’entre dans une pièce !) Je m’avance jusqu’à mon armoire et décide de m’installer tranquillement.

Une fois mes affaires déposées, j’essaye d’entamer la discussion avec ma voisine. Le plus simple à l’hôpital étant de commencer par : « ça fait longtemps que vous êtes ici ? » 

(Trucs et astuces de l’hôpital : le « ça fait longtemps que vous êtes ici » est une excellente technique d’approche pour débuter une conversation. S’en suivra le «Ah oui quand même… Et vous êtes là pour quoi, si ce n’est pas indiscret ? », doublé d’un inévitable « Hum… Pas cool… on n’est jamais là par plaisir de toutes façons… » Ce trio fonctionne à tous les coups, quelle que soit la réponse. Je vous sens septique. Bon je vous fais un exemple, mais ne vous viendrez pas vous plaindre de la longueur de l’article hein ! Alors je vais prendre deux exemples extrêmes comme ça, vous ne pourrez pas dire… : 

Exemple 1 : 
-         - Bonjour… (Là on vous répond ou non, mais ne baissez pas les bras !) Ça fait longtemps que vous êtes ici ?
-         -  Roh ben oui déjà 3 mois !
-         -  Ah oui quand même. Et vous êtes là pour quoi, si ce n’est pas indiscret ? 
-         -  Cancer…
-         -  Hum… Pas cool… on n’est jamais là par plaisir de toutes façons… 

Exemple 2 : 

-       -   Bonjour… (Là on vous répond ou non, mais…) Ça fait longtemps que vous êtes ici ?
-          - Roh ben oui déjà 3 jours !
-         -  Ah oui quand même. Et vous êtes là pour quoi, si ce n’est pas indiscret ? 
-          - Coloscopie…
-        -   Hum… Pas cool… on n’est jamais là par plaisir de toutes façons… 

CQFD… Ce qu’il fallait démontrer ! On peut reprendre ?... Bon…)

Elle me répond donc qu’elle est là depuis 5 jours, qu’elle est venue pour une coloscopie mais qu’il lui avait trouvé un polype et qu’avec son sang trop liquide, puis de toute façon à son âge, elle vivait déjà en foyer et qu’elle attendait une place en EHPAD, mais que bon c’était plein et qu’il fallait attendre que quelqu’un meurt… (Oui alors j’ai bien dit que c’était utile pour entamer la conversation, pas que la réponse allait vous intéresser !) 

De là mes parents sont arrivés et j’ai eu le droit à une permission. (Attention retour exigé à 16 heures sinon vous êtes considérée comme déserteur !) J’ai donc laissé la vieille dame déblatérer seule. Je me suis rendue compte de son capital sympathie lorsque ma maman lui a gentiment demandé si elle pouvait utiliser la salle de bain (bon les toilettes quoi !) parce qu’après quasiment 3 heures de route, en tant que fille qui se respecte… ça devenait difficile ! Elle lui a répondu : « Ben oui vous pouvez… Mais bon doit bien y en avoir dans le couloir quand même ! »

Voilà, voilà ! 

De retour de perm’, la voisine n’avait pas bougé d’un iota. Elle était dans son lit, sans lecture, sans télé, sans jeux, sans visite… Bref la journée avait dû être longue. 

Lorsque les plateaux repas sont arrivés, elle a commencé à râler. (Bon ok c’est pas de la grosse gastronomie, mais parfois on a le droit à des délichoc’ alors bon !) Elle m’a demandé pourquoi je ne mangeais pas. Je lui ai répondu que je ne pouvais pas vraiment. Elle a donc rétorqué « De toute façon les plateaux sont trop chargés, ça fait du gâchis ! ». Tant de compassion… 

Après le repas, elle m’a demandé pourquoi j’étais là. (Il faut savoir que juste après mon arrivée j’étais en pleine perfusion. Elle m’avait regardé en me lançant un « C’est pas facile ce qu’ils vous font ! » Ne comprenant pas, je lui avais demandé de répéter. Ce sur quoi, elle m’avait dit qu’avoir un cancer à mon âge ce n’était pas facile ! Dans un rire étouffé, je lui ai répondu qu’il s’agissait d’un antibiotique et non d’une chimiothérapie et que j’étais là pour une infection…Suite à cela, elle n’avait pas creusé plus en profondeur.)
Je lui réponds que je suis là pour une infection sur le cathéter (tout en lui montrant le responsable) et que je risquais une septicémie. Et c’est dans un moment de grâce extrême qu’elle me sort : « Ah oui moi j’ai fait une cystite une fois… Ben je ne le souhaite à personne ! » Ah ben oui, septicémie (infection du sang), Cystite (infection urinaire), à ça près on y est ! 

Je sentais alors que ma coloc’ ne serait pas la plus sympathique que j’aurais connu mais que ce n’était pas grave. Sauf que je ne savais pas qu’à partir de 20 heures, la veille dame allait se transformer en tyran ! 

A 19h45, elle se plaint que ça fait une semaine qu’elle ne suit plus les actualités. Gentiment je décide donc de tourner mon écran (les tv sont individuelles et tactiles, elles sont disposées avec un bras articulé derrière notre lit. Autant dire que c’est notre télé quoi !) afin qu’elle puisse regarder le 19.45 avec moi. Plutôt que de me remercier elle me dit « Il est bientôt 20 heures, le journal de la 1 il est mieux. » Je lui dis avec un peu de fermeté qu’il faudrait se contenter de celui-là. (Je veux bien être gentille mais j’ai mes limites ! Je lui avais proposé avant de partir en perm’ de lui allumer la tv, elle m’avait répondu que c’était trop moderne pour elle et qu’elle ne voulait pas s’en servir…C’est bien connu la modernité c’est trop risqué, surtout quand quelqu’un s’en occupe et que vous avez juste à regarder !)

A 20h30, elle m’a demandé de bien vouloir éteindre ma lumière. Ce que j’ai fait (naïvement). A 21 heures, elle m’a demandé une première fois si je ne voulais pas me coucher. Je lui ai dit qu’il était encore trop tôt. (Même les poules étaient encore levées !) A 22H15, elle m’a intimé l’ordre d’éteindre ma télé. Comme elle ne la voyait pas car j’avais pris garde de tirer le rideau de séparation et surtout qu’elle ne l’entendait pas puisque j’avais mis mon casque, j’ai refusé en justifiant que je regardais une émission qui m’intéressait. (Et encore que ce ne fût pas le cas j’avais le droit !) A 22 h 45, elle s’est levée en pestant et me disant que je n’étais pas gentille, (Oui c’est souvent ce qu’on dit de moi !) que la lumière la dérangeait que je devais éteindre. Comme je ne voulais pas d’incident diplomatique le premier soir j’ai décidé d’obtempérer. (Bien mal m’en a pris !)  Dans la nuit, je n’arrivais pas à dormir et je décide donc de m’occuper avec mon portable. Alors qu’elle s’était levée 4 fois dans la nuit en allumant la lumière commune de la chambre (Non mais moi c’est bien connu ça ne me dérange pas d’avoir la lumière en pleine tête la nuit !), elle a réussi à me dire que mon portable la gênait. Un peu au bout de ma patience, (Quand on est réveillée 4 fois dans la nuit par sa voisine qui traine des pieds et qu’on prend sur soi, alors qu’on est soi-même légèrement insomniaque, ça peut entamer un chouilla votre calme légendaire.), je lui ai rétorqué que si elle préférait je pouvais allumer ma lumière de chevet pour lire ! Elle n’a rien trouvé à redire et s’est couchée.
Le lendemain, elle était aimable comme tout, comme si aucun des évènements de la nuit n’avait eu lieu. Elle m’a même proposé de voir sa prothèse mammaire… Comme ça, sans raison, c’est gratuit ! (Heureusement que je prends des trucs pour les nausées ! Elle a dû se dire qu’il fallait qu’elle forme la jeunesse aux risques du cancer du sein… Je ne sais pas !) 

Malheureusement tous les soirs de la semaine ont été un copier-coller. A 20 heures elle commençait déjà à me demander d’éteindre. Puis elle devenait hargneuse en me disant que je n’étais pas gentille du tout, elle m’interpellait par des « Oh ! Oh ! Oh ! Elle entend rien celle-là hein ! » (ça fait toujours plaisir !)
 Elle pestait, se levait… Un soir elle a même demandé aux infirmières de me faire éteindre ma télévision. Ces dernières lui ont dit que je respectais toutes les règles de vie en communauté et que par conséquent je pouvais faire comme bon me semblait. 
Autant dire que Tatie Danielle n’a pas appréciée. Elle me l’a fait payer toute la nuit, en faisant exprès de se lever bruyamment, d’allumer toutes les lumières, de les laisser éclairer le plus longtemps possible. Bref, notre bonne entente était clairement consumée… 
 
Je pensais que ma vie à l’hôpital avait atteint son paroxysme après cette colocation… Mais non, il ne faut jamais présumer de ce que l’avenir nous réserve, il est plein de ressource ! 

Bon, vous vous doutez bien de ce qui va se passer là… Non ?
Eh oui, la suite dans un prochain épisode, je ne vous ai pas dit mais je suis auteure dans les feux de l’amour et plus belle la vie aussi !