Corps, (oui là on est bien concis, précis, juste !) HUM HUM (c'est un éclaircissement de gorge, comme avant les grands discours, m'voyez ? Bon on reprend...)
Corps,
Je sens que tu ne m'aimes pas.
Alors peut être ai-je des aprioris, peut être que j'interprète (la formulation en "verbe-sujet' inversés utilisée précédemment ne rendait rien... interprète-je c'est moche, qu'on se le dise...) mal les signes mais je pense pouvoir le dire sans trop m'avancer : je sens que tu ne m'aimes pas.
Voilà 28 ans (quoi bientôt 29 ? oui ben on n'y est pas encore il me semble donc mollo sur le vieillissement !) que nous vivons ensemble toi et moi. C'est long 28 ans, peu de couples y résistent. Les années qui filent, les écarts qui se creusent et puis tu sais, c'est pas toi, c'est moi ! (Oui cette fameuse phrase qui ne veut rien dire mais qui permet de filer en douce, sans verre cassé, sans scène digne d'un molière.)
Je t'ai permis de faire du sport, ça prenait du temps, tu rentrais fatigué mais je ne t'ai jamais reproché quoique ce soit.
Tu as voulu faire du piano, je t'ai laissé faire du piano.
Tu as voulu faire du théâtre, je t'ai laissé faire du théâtre.
Tu as voulu voir Vesoul... Alors là non ! Moi j'ai jamais cautionné Vesoul et sache que si je t'ai laissé y aller, c'est uniquement pour cause familiale !
Il me semble tout de même que tu avais de la liberté mon petit corps ! Ah ça, la liberté tu en as pris, de plus en plus !
Sache que nous cerveau et émotions, on a subi ton comportement, plus d'une fois ! Les nuits blanches parce que tu ne savais pas comment te gérer, parce que tu rentrais complètement meurtri d'une activité.
Les lendemains à ne pas assumer, tu empêches tout le monde de dormir ok, sauf que pour la concentration les jours suivants, c'est qui qui devait assurer hein ? C'est bibi !
Je bosse moi mon gars ! La proprio me demande des efforts pour les études, pour la vie sociale, pour paraitre en forme et toi ? Toi tu ne fais aucun effort ! On dirait un mec bourré : tu te tapes dans les encadrements de portes, tu tombes, tu lâches tout, tu vomis encore et encore...
On passe pour quoi nous, le corps ? Tu peux me dire ? On passe pour quoi ?
Et je ne te parle pas du ménage, le corps ! Je me tape tout ici ! Je répète sans cesse : faut que ça soit propre, faut nettoyer, faut ranger ! A longueur de journée ! Ca ne te plait peut être pas, mais le chef des opérations ici c'est moi. Tu es un exécutant c'est comme ça. Et un exécutant ça.... (allez y je vous laisse un peu réfléchir, enfin si vous êtes toujours là... parce que peut être que vous m'avez laissé dans ma schizophrénie ambiante... Mon cerveau en train d'engueuler le propre corps dans lequel il siège... je peux comprendre que le concept est... Novateur certes, mais pas simple )
Un exécutant, ça exécute.
Je ne te laisse pas le choix, tu dois le faire. Je te force tous les matins à te lever, je te force à faire les courses, je te force à travailler, je te force à avoir une allure présentable, je te force à ranger, je te force à faire le ménage, je te force à avoir une vie sociale.
Oui, j'ai le rôle chiant ! Mais si je ne le fais pas, qui le fera ? Je suis le cerveau des opérations, je ne te laisse pas le choix, tu dois le faire.
Mais au bout de 28 ans à te donner des ordres, et à t'obliger je sens la rébellion. Tu te mets en grève de plus en plus souvent. Tu refuses de m'écouter. Tu fais n'importe quoi. Tu argues la fatigue, tu te mets en arrêt maladie. Mais moi dans tout ça le corps ? Tu as pensé à moi ?
Il y a quelques mois j'ai lâché prise... j'ai fait comme toi, j'ai laissé coulé. Je me suis dit qu'après tout si tu ne faisais aucun effort, je ne vois pas pourquoi j'étais forcé d'en faire.
Moi le cerveau, j'ai décidé d'arrêter de réfléchir, d'arrêter de forcer les choses. J'ai fait comme toi.
Résultat ? On a perdu l'un des seuls être qui nous supportait jour et nuit, qui nous aimait, qui nous soutenait.
Alors tu vois le corps, on ne peut pas tous abandonner en même temps, car si on le fait, on perd la bataille.
Dans la vie, il faut un meneur, et tu ne peux pas l'être car tu n'es pas assez fiable.
Regarde, je nous trouve du travail et toi au bout de 2 mois tu ne fais déjà plus aucun effort.
Je rame seul !
Je suis tiraillé entre toi et les émotions qui se laissent influencées par ton état d'esprit. Tu es une mauvaise fréquentation ! (Un peu comme quand plus petit on nous disait :"'dis donc en ce moment je ne sais pas qui tu fréquentes mais... " Et puis c'est tout. Le Mais... se suffisait à lui seul. Et la phrase se terminait régulièrement par "Mais va falloir que ça change !")
Tu vois le corps, je sais qui tu fréquentes (car en tant que cerveau j'ai vu sur tout) mais je te le dis quand même il va falloir que ça change !
A 28 ans je suis épuisé de devoir te trainer partout, de devoir justifier tes absences, de devoir faire semblant pour deux, de devoir rattraper tes bêtises, de devoir redoubler d'attention parce que tu ne mènes pas la vie que je voudrais avoir. A 28 ans, je ne veux pas que tu influes sur ma vie amoureuse (ou à la rigueur ton rôle serait d'être canon, voir légèrement sexy, sourire ultra brite et tutti quanti ! Tu dois arrêté d'être un boulet.) A 28 ans, je te demande d'être un peu autonome.
Corps, à nous non plus (je parle toujours en compagnie des émotions... Je précise après ça vous allez croire que je suis mégalo ... Ou complètement siphonnée alors que franchement : PAS DU TOUT !), ça ne nous fait pas plaisir de partager ta vie, sache le. Si nous pouvions changer de coloc, nous le ferions.
Parce que nous on a envie d'une vie simple et saine.
Parce que nous on a envie d'amour, d'amitié, de profiter, de voyager, de travailler, de jouer.
Parce que nous, on voudrait juste devoir arrêter de choisir entre "se laver les cheveux" ou "passer le balais", entre "sortir pour une soirée jeux" ou "travailler".
A 28 ans, on devrait être capable en bonne collaboration de mener toutes ces activités en même temps.
Alors tu vois le corps, tout ça c'est ce que j'aurais pu te dire si je te savais en bonne santé et que je savais que c'était vraiment de la mauvaise volonté... Mais en tant que pilote des opérations, je sais bien que toi aussi, tu rêves de faire tout ça et que tu es frustré ! Alors mon très cher corps, non je ne t'abandonnerai pas, et on continuera ensemble à pleurer sur cette vie qui nous semble injuste, à rigoler sur des détails, à s'émerveiller devant un coucher de soleil, à espérer qu'un jour on nous aime pour toujours comme on est toi et moi, corps et cerveau (et émotions), pas toujours à la norme.
Mon très cher corps, c'est pas de ta faute tout ça et l'essentiel c'est qu'on ne l'oublie pas.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire